Christophe Leguevaques Avocat barreau Paris-Toulouse
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#Levothyrox : les malades prêts pour une nouvelle action collective au tribunal administratif


(interview parue dans la DEPECHE DU MIDI)



« Seul un scandale sanitaire majeur peut expliquer l’accumulation des mensonges du fabricant et des autorités »
 
 
 
Un an après le changement de formule du LEVOTHYROX, quel bilan tirez vous de ce dossier ?
 
Dans une interview sur SUD RADIO le 19 décembre 2017, Mme Agnès BUZYN déclarait : « ‘L’Agence du médicament a demandé à Merck en 2015 de changer sa formule car elle était instable, et le laboratoire s’est soumis à la pression des autorités françaises pour changer cette formule. La nouvelle est meilleure ».
 
Cette affirmation est doublement mensongère.
 
Tout d’abord, la nouvelle formule n’est pas meilleure. Dans son avis du 22 mars 2017, la commission de la transparence de la Haute autorité de santé considère que « Ces présentations sont des compléments de gamme qui n’apportent pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V) par rapport aux présentations déjà inscrites. »
 
Et surtout, l’ancienne formule n’était pas instable.
 
 
Comment pouvez-vous être aussi affirmatif ?
 
Tout simplement parce que nous avons vérifié auprès de l’agence sanitaire américaine la puissante FDA (Food and drug administration).
 
Un médicament est un produit « vivant ». Entre sa production dans une usine et sa consommation au bout de plusieurs mois, le principe actif peut s’altérer. C’est la raison pour laquelle, les autorités sanitaires acceptent qu’un même médicament contienne entre 90 et 111 % de principe actif.
 
Mais la levothyroxine est une hormone de synthèse à marge thérapeutique étroite, c’est-à-dire qu’une différence de 12,5 microgrammes peut suffire pour rendre le traitement inefficace voire nuisible.
 
Dès 2005, la FDA a exigé que la marge du principe actif soit réduite à 95 / 105 %.
 
A cette époque, la filiale américaine de Merck KgaA, Genpharm, a écrit à la FDA pour sa levothyroxine sodique commercialisée sous le nom NOVOTHYROX en expliquant que ce produit était fabriqué dans son usine de Darmstadt (Allemagne), commercialisé dans 62 pays et contenait du lactose. Seule différence, le NOVOTHYROX est coloré lorsque le LEVOTHYROX est blanc, mais la composition est identique.
 
Jusque là rien de nouveau. 
Mais, MERCK ajoute, en se vantant un peu, que son NOVOTHYROX respecte déjà la norme 95 / 105 % ! Nous sommes en 2005, sept ans avant que l’ANSM n’interroge MERCK.
 
Comme le Novothyrox est le nom américain du levothyrox, on peut en déduire que l’ancienne formule avec lactose respectait avant 2012 la norme 95 / 105 % !
 
Ce qui veut dire que le changement de formule de 2017 ne peut pas être causé par cette normalisation. La vérité est ailleurs, c’est-à-dire par la volonté de MERCK de déposer un nouveau brevet pour un médicament « mee to » lui assurant une rente de situation.
 
Cela interroge sur le rôle et l’indépendance de l’ANSM : soit l’agence est incompétente, car elle ne sait pas dialoguer avec son homologue américain, soit l’agence est complice de MERCK et tente de le dissimuler.
 
On a l’impression que la crise du Médiator n’a débouché que sur des rustines. Les malades peuvent légitimement s’interroger sur le niveau de protection assuré par les pouvoirs publics.
 
Seul un scandale sanitaire majeur peut expliquer l’accumulation des mensonges du fabricant et des autorités 
 
 
Qu’allez-vous faire ?
 
Le moment venu, nous porterons cette information à la connaissance du juge d’instruction.
 
Mais pour l’heure, nous nous concentrons sur la prochaine action collective.
 
Nous souhaitons anticiper l’avenir. MERCK annonce qu’elle arrêtera la production de l’ancienne formule avec lactose dans toute l’Union européenne à la fin de l’année 2018.
 
C’est la raison pour laquelle nous avons demandé à Mme BUZYN de réquisitionner tout ou partie de la production du lévothyrox avec lactose de l’usine de Bourgoin-Jallieu. Comme elle tend â être plus à l’écoute des industriels que des malades, la ministre de la santé a refusé au prétexte qu’il existerait des alternatives. Nouveau mensonge : les malades se plaignent de ne pas trouver ces alternatives. Par ailleurs, la ministre oublie que pour utiliser ces médicaments, on oblige les malades à supporter de nombreux mois de désagréments jusqu’à trouver le bon dosage. C’est d’autant plus insupportable qu’avant mars 2017, les malades étaient équilibrés et vivaient en bonne entente avec leur traitement. Pour des raisons tout sauf thérapeutique, on a changé ce traitement sans leur apporter la moindre amélioration du service médical. Visiblement, les malades ne sont pas au centre du système médical.
 
Devant son refus, nous allons saisir la justice administrative. Notre objectif est d’être prêt pour la journée mondiale de la thyroïde le 25 mai 2018.





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Christophe Lèguevaques


Avocat au barreau de Paris - Docteur en droit


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Christophe Lèguevaques est membre-fondateur de METIS-AVOCATS AARPII - Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle Inter-barreaux


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