Plaidoirie dans le dossier AZF devant le Tribunal correctionnel de Toulouse (14 juin 2009)




Procés exceptionnel : salle d'audience exceptionnelle



Monsieur le président, Mesdames, Monsieur,

J’ai l’honneur de prendre la parole au nom de la Ville de Toulouse, de l’association des sinistrés du 21 septembre 2001, de Madame Delon et de Madame Patche et de sa fille Flora dans le procès AZF les opposant à la société GRANDE PAROISSE et à M. Serge BIECHLIN.

C’est un procès extraordinaire à tout point de vue.

Votre tache est redoutable : déterminer la vérité dans ce magma d’informations parfois contradictoires et condamner les responsables, tous les responsables quels qu’ils soient. Il a vous fallu beaucoup de courage pour accepter cette mission, du courage pour tenir cette audience. Il vous faudra encore du courage pour trancher. Car, si l’on en croit Hannah Arendt « l’acte de juger constitue l’acte de liberté par excellence ».

C’est donc à un tribunal libre de toute pression et fort de son courage que je m’adresse aujourd’hui.

Devant vous, je veux être la voix des sans voix, je veux porter la parole des cent voix d’une ville blessée, meurtrie, défigurée par le plus grand accident industriel survenu en France au XXe siècle.

Pour l’association des sinistrés du 21 septembre 2001, qui a réuni jusqu’à 1700 victimes de l’explosion, je veux tenter de clarifier un dossier dont la défense n’a eu de cesse de le complexifier, de l’obscurcir, de l’enliser.

Pour Madame Delon qui souffre toujours dans sa chair et qui n’a pas été indemnisée intégralement, je montrerai la duplicité des responsables qui donnent d’une main pour acheter le silence de l’autre.

Enfin, pour Flora, 3 ans au moment de l’explosion de l’usine AZF, je démontrerai comment un enchaînement d’erreurs, de négligences, et de fautes a pu conduire à cette catastrophe qui a coûté la vie à son papa.

En effet, ce vendredi 21 septembre 2001, le papa de Flora était venu faire réparer son automobile chez Midas de l’autre coté de la rocade.

Je veux également parler à tous ceux, quel que soit le côté de la rocade où ils se trouvaient ce vendredi 21 septembre 2001 aux alentours de 10h17.

Qu’ils soient à l’intérieur de l’usine, ou à l’extérieur, tous les toulousains ont vu leur vie basculée ce jour-là. Pour avoir été l’un des leurs, un de ceux de l’intérieur, de cette citadelle assiégée aux bordures de la ville et aux bords de Garonne, je connais la peine des ouvriers de Grande Paroisse.

Jamais, ils ne pourront me reprocher une accusation déplacée contre eux, jamais je n’ai créé la polémique. Et si parfois, je les ai un peu bousculés c’était au nom de cette recherche éperdue de la vérité qui est notre souci commun.

« Chercher la vérité et la dire », c’est, pour Jean Jaurès, l’une des formes de ce courage. Et il en faut également du courage pour ne pas hésiter à froisser la susceptibilité d’anciens camarades de travail.

L’amitié est à ce prix : dire la vérité, la répéter, l’expliquer inlassablement, faire entendre raison contre la facilité des croyances.

Parmi les regrets que j’ai dans ce dossier, il y a celui de la simplicité avec laquelle le groupe industriel a pu ériger un mur invisible entre les victimes.

Diviser pour mieux régner, n’est pas la devise de tous ceux qui sont tentés d’abuser de leur pouvoir ?

Mais au-delà des manœuvres de ce groupe puissant, il demeure une réalité. Toutes les victimes ont un point commun, elles recherchent la vérité, elles veulent « et comprendre et juger ».


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