Christophe Leguevaques Avocat barreau Paris-Toulouse
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Conséquences manifestement excessives justifiant la suspension de l'exécution d'un jugement


Le risque de non restitution des fonds par le créancier qui a commencé à exécuter le jugement entrepris constitue des conséquences manifestement excessives pour le débiteur justifiant la suspension de l'exécution provisoire ordonnée



Ordonnance du Premier Président de la Cour d'appel de Paris (Pôle 1, chambre 5) - 20 Mars 2014 - RG N° 14/00972

SAS CANNES PALACE c./ SARL LA COMPAGNIE ART & PLACEMENT

NOUS, Evelyne LOUYS, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Marine BERNARD, Greffière.
 
Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :
 
SAS CANNES PALACE
Représentée par Me Christophe LEGUEVAQUES de la SELARL CHRISTOPHE LEGUEVAQUES, AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0494
DEMANDERESSE
 
à
 
SARL LA COMPAGNIE ART & PLACEMENT
Représentée par Me William BOURDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R143
Substitué par Me Sandrine RICHER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0076

DEFENDERESSE
 
Et après avoir entendu les parties ou leur conseil lors des débats de l'audience publique du 27 Février 2014 :
 
La SAS Cannes Palace est appelante d'un jugement rendu le 19 novembre 2013 par le tribunal de commerce de Paris qui l'a condamnée à payer à la société Compagnie Art & Placement la somme de 30 millions d'euros avec intérêts au taux légal à compter de la sommation du 21 février 2013, celle de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, a ordonné l'exécution provisoire et mis à sa charge les dépens.
 
Par acte d'huissier du 17 janvier 2013, la société Cannes Palace a assigné la société Compagnie Art & Placement devant le délégataire du premier président aux fins de voir ordonner la suspension de l'exécution provisoire dont est assortie la décision entreprise ainsi que la condamnation de cette dernière à lui verser une somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile portée à 20.000 euros dans ses écritures ultérieures ainsi qu'aux dépens.
 
Aux termes de son assignation, de ses écritures déposées le 27 février 2014 et de ses observations orales à l'audience, la société Cannes Palace fait valoir que la société Art & Placement tente d'obtenir frauduleusement une créance afin de prendre le contrôle des murs d'un hôtel de prestige sur la Croisette à Cannes ; que le principe du contradictoire a été violé et qu'il existe un risque de conséquences manifestement excessives dès lors qu'elle est dans l'attente du paiement du prix de cession d'un fonds de commerce d'un hôtel à Cannes et que l'exécution immédiate du jugement entraînerait sa mise en redressement ou en liquidation judiciaire ; que la Compagnie Art & Placement a commencé à exécuter le jugement entrepris et que cette dernière ne présente aucune garantie de représentation des fonds.
 
Selon des écritures déposées le 27 février 2014 soutenues oralement à l'audience, la société Compagnie Art & Placement sollicite le débouté de toutes les demandes de la société Cannes Palace et la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux dépens.
 
Elle soutient qu'il n'existe aucune violation du principe du contradictoire ni risque de conséquences manifestement excessives sachant que la société Cannes Palace n'a ni activité économique ni salarié et que sa seule raison d'exister serait d'attendre le versement d'un prix de cession d'un fonds de commerce, attente qui se poursuit depuis des années ; qu'il ne peut lui être reproché de tenter de recouvrer sa créance en raison du risque d'évaporation dans une quelconque structure du groupe Clannathone pas plus qu'un prétendu risque de défaut de représentation des fonds.
 
SUR CE
 
Considérant qu'en vertu de l'article 524 du code de procédure civile, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, par le premier président statuant en référé que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ;
 
Considérant que les circonstances manifestement excessives doivent être appréciées par rapport à la situation du débiteur compte tenu de ses facultés de paiement ou des facultés de remboursement du créancier ;
 
Considérant qu'en l'espèce, l'exécution provisoire du jugement ayant été ordonnée, l'arrêt de l'exécution provisoire n'est pas subordonnée à la justification cumulative d'une violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et d'un risque de conséquences manifestement excessives ;
 
Considérant cependant, qu'il importe de relever que le jugement réputé contradictoire a été rendu en l'absence de représentation à l'audience de la société Cannes Palace qui n'a pas fait valoir ses moyens de défense alors que le montant de la condamnation porte sur une somme particulièrement importante s'agissant de 30 millions d'euros ;
 
Considérant la société Cannes Palace ne démontre pas l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives en l'absence de péril démontré en cas de non paiement du montant de la condamnation dès lors qu'elle est sans activité et sans salarié et qu'elle ne fait état que de l'éventualité d'une mise en redressement ou liquidation judiciaire alors qu'elle est dans l'attente de paiement du prix de cession du fonds de commerce de l'hôtel à Cannes, prix devant être versé dans le cadre d'un plan de continuation en cours de validation par la cour d'appel d'Aix en Provence ;
 
Considérant qu'en revanche, il résulte des pièces produites que la société Compagnie Art & Placement est une société à responsabilité limitée au capital de 20.000 euros qui ne figure pas dans les pages jaunes à l'adresse de son siège social, qui ne justifie d'aucun site internet permettant d'apprécier la réalité de son activité et qui n'a jamais déposé ses comptes sociaux depuis son immatriculation en 2002, toutes affirmations non contestées, la société Compagnie Art & Placement n'hésitant pas à se justifier en indiquant «qu'un certain nombre de sociétés préfèrent ne pas rendre leur comptes publics» alors qu'il s'agit d'une obligation légale et qu'elle se garde de communiquer les documents comptables seuls de nature à établir sa situation financière et sa capacité de remboursement des fonds versés en cas d'infirmation de la décision déférée à la cour ;
 
Considérant qu'il s'infère de ces éléments qu'il existe un risque de non restitution des fonds par la société Art & Placement qui a commencé à exécuter le jugement entrepris ce qui constitue des conséquences manifestement excessives pour la société Cannes Palace justifiant la suspension de l'exécution provisoire ordonnée par le jugement du 19 novembre 2013';
 
PAR CES MOTIFS
 
Ordonnons la suspension de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu le 19 novembre 2013 par le tribunal de commerce de Paris.
 
Condamnons la société Compagnie Art & Placement à verser la société Cannes Palace la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
 
Condamnons la société Compagnie Art & Placement aux dépens de l'instance.
 
ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
 
La Greffière
 
La Présidente
 




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Christophe Lèguevaques


Avocat au barreau de Paris - Docteur en droit


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Christophe Lèguevaques est membre-fondateur de METIS-AVOCATS AARPII - Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle Inter-barreaux


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